Écrire est un métier – Les finances : combien je gagne avec mes livres

Avec la série de billets « Écrire est un métier », je souhaite vous montrer le travail qui se cache derrière la passion et combattre quelques préjugés autour de l’écriture.

Lorsque vous dites que vous écrivez, la plupart des gens partent du principe que vous faites cela sur votre temps libre, que ce n’est qu’un divertissement et que vous avez un « vrai » métier à côté. Pourtant, une question revient toujours, qu’on ne me pose jamais lorsque je parle de ma passion pour les jeux vidéo par exemple : tu les vends, tes livres ? Et surtout : tu touches combien ? Vous l’aurez compris, dans ce billet, on va parler pépettes et aussi s’aventurer dans la grande question : qu’est-ce qui rapporte le plus, de l’ebook ou du broché ?

Combien je gagne avec mes livres

Autant le dire tout de suite : je ne gagne presque rien avec mes romans. J’ose espérer que ce ne sera pas une réponse définitive ! Mais en attendant, au moment où j’écris ce billet, après deux ans et demi et trois romans publiés, j’ai vendu 33 exemplaires et gagné 55 euros. Oui, vous avez bien compté, moins de 1,70 euros par livre. Alors qu’ils sont vendus 5 euros pour le moins cher.

Bon, déjà, on doit retirer aux 33 exemplaires les 10 vendus sur Kobo et la Fnac qui ne rassemblent pas le montant suffisant pour récupérer les redevances. Eh oui, car si KDP vous verse vos redevances quel qu’en soit le montant, KWL ne vous les vire qu’au-dessus d’une certaine somme. Le volume, toujours le volume… Cela ne fait toujours guère que 2,40 euros par livre. Mais où sont donc passés les 2,60 euros restants ? Pour le savoir, vous devez comprendre deux choses : la composition du prix du livre et la différence entre un broché et un ebook.

Comment est déterminé le prix de mes livres ?

Pour fixer le prix de mes livres, un petit calcul s’impose. La première question qui vient est « quel prix le lectorat trouvera-t-il convenable ? » La tentation serait de répondre « gratuit, bien sûr ! » La réalité n’est pas si simple. D’abord parce que la relation entre prix et impression de qualité est très complexe et qu’un même prix aura des effets très différents en fonction de la personne et du produit. Dans tous les cas, rien ne garantit que la gratuité fonctionne à tous les coups. Mais surtout, la gratuité n’entre même pas dans les options possibles : si les auteur·rice·s étaient rémunéré·e·s pour leur art, leurs livres pourraient peut-être être proposés gratuitement. Or dans le système actuel, les écrivain·e·s ne sont que peu voire pas rémunéré·e·s pour leur travail, à moins de vendre les livres. En attendant l’aboutissement d’un changement du système, le prix de mes livres est donc par défaut supérieur à zéro.

Ceci étant posé, comme je l’ai dit, évaluer le prix adéquat en fonction du produit peut s’avérer très complexe. Le moyen par défaut le plus simple que j’aie trouvé pour l’instant était de comparer les prix du marché et de suivre les conseils de pairs1. Ceci constitue une première base, mais d’autres facteurs que la convenance du prix pour le public entrent en ligne de compte. En particulier, les frais divers et variés de fabrication, d’envoi ou encore de taxes… Sur ce point, le livre numérique et le livre papier diffèrent très nettement. Je vous détaille cela après.

Mais avant cela, vous devez bien saisir que lorsque vous payez un produit 10 euros, vous ne donnez pas 10 euros à la personne qui l’a créé ou fabriqué. Vous donnez 10 euros qui sont ensuite répartis entre toutes les parties impliquées… et qui peuvent être très nombreuses. Oui, même en autoédition, même quand l’auteur·rice réduit les investissements au minimum ! Je passe rapidement sur les coûts cachés, ce billet n’étant pas un guide de l’édition (mais je pourrai en rédiger un si cela vous intéresse), mais même en choisissant les options les moins coûteuses, en prenant moi-même en charge la correction et la couverture, en publiant sur des plateformes gratuites… je ne publie tout de même pas pour zéro euros. En vrac dans les frais qui me sont finalement tombés dessus dans mon aventure autoéditée : le plan WordPress et le nom de domaine du site, quelques frais postaux, les coûts d’envoi des épreuves…

Mais si on ne compte pas les frais supplémentaires que je paye et que l’on reste uniquement sur la composition du prix du livre en tant que tel, on s’aperçoit qu’une partie ne me rapporte pas. En premier lieu, entre en jeu la plateforme de publication, en l’occurrence Amazon KDP et Kobo WL en ce qui me concerne. Sur un ebook à 4,99 euros, je ne touche que 70 %, soit 3,49 euros. Sachant que sur mes 23 exemplaires vendus, 8 étaient des ebooks, nous restent 27 euros pour 15 brochés. Soit 1,80 euro par livre ! Comment, cela descend encore ?! C’est là que nous arrivons à la partie la plus intéressante : la différence entre le livre numérique et le livre papier, et pourquoi vous soutiendrez bien mieux un·e auteur·rice en achetant le premier que le second.

Des différences entre broché et ebook

Si vous lisez des livres numériques, vous l’aurez probablement très vite remarqué : les prix sont différents entre ebook et broché, le premier étant nettement moins cher que le second. Pour le lectorat du moins.

Car côté auteur·rice, la différence est un peu plus complexe. Le broché comporte en effet un élément qui change tout : l’impression, laquelle a un coût. Reprenons donc le système de redevances de KDP. Pour l’ebook, je gagne 70% du prix public, Amazon récoltant le reste. Mais pour le broché, le calcul est différent. Pour commencer, la redevance sur broché n’est pas de 70%… mais de 60%. Ensuite, les 60% ne s’appliquent pas au prix public TTC mais HT (coucou la TVA). Mais à ce stade, vous n’avez pas encore vos redevances. Vous devez encore retrancher les coûts d’impression. Pour indication, ces derniers s’élèvent à 3,43 euros pour Les Portes du chaos et 4,81 euros pour Les Ombres d’Aleyssia. Et voilà comment ne plus gagner que trois euros sur un livre vendu une dizaine !

Pour résumer, le livre papier coûte plus cher au lectorat et rapporte moins à l’auteur·rice que le livre numérique. Je comprends tout à fait les arguments en faveur du livre papier et loin de moi l’idée de les comparer pour décider lequel est le meilleur. D’ailleurs, si je produis les deux, c’est bien parce que je ne vois aucun intérêt à les mettre en opposition. Je voudrais simplement tempérer l’ardeur de la défense du livre papier en rappelant qu’au-delà des arguments en faveur ou en défaveur de l’un ou l’autre format, le prix vient remettre les choses à plat. Si on parle revenus, l’ebook est plus intéressant pour moi. MAIS ! Ce serait une erreur que de s’arrêter au prix à l’unité. Car si un facteur revêt une importance capitale pour les écrivain·e·s, c’est bien le nombre d’exemplaires vendus ! Voilà pourquoi je peux gagner davantage avec mes livres brochés que numériques : simplement parce que le lectorat décidera d’acheter plutôt le premier que le second.

Vous l’aurez constaté, les histoires financières aux pays du livre sont bien complexes… pour finalement rapporter si peu. Mais hauts les cœurs, je ne désespère nullement de toucher mon public et de finir par vendre de plus en plus ! Sachez en tous cas qu’à chaque fois que vous achetez un livre à un·e auteur·rice autopublié·e, cela a une incidence énorme !

Merci donc à tout mon lectorat qui me lit, achète mes ouvrages et en parle, car sans vous, l’art tournerait en vase clos… Je vous retrouve prochainement pour la troisième et dernière partie de ce billet !

À très vite !

ST

[1] Notez que je pourrais aussi déterminer le prix du livre en fonction du travail effectué et de mes besoins pour vivre, comme cela se fait dans nombre de métiers. Considérant le temps nécessaire pour produire un livre, je devrais donc le vendre quelques milliers d’euros… Un prix que, je n’en doute pas, vous n’accepteriez pas de payer ! D’où l’option privilégiée de fixer un prix à l’unité bien plus bas et de compter sur le nombre d’exemplaires vendus. Un sujet que je pourrai aborder dans un prochain billet…

Publié par Sarah Touzeau Romans

Romans fantasy et science-fiction

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.